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Parentalité Créative

Une expérience d’apprentissage édifiante

L’apprentissage est un sujet que j’ai beaucoup creusé ! Et j’ai fini par comprendre que malgré la vision que j’avais de mon parcours d’apprenante assez formatée par l’institution scolaire, il y avait une expérience d’apprentissage fascinante que j’avais vécue pendant des années, et que je vivais encore.

 

Cette expérience répondait totalement aux conditions de l’apprentissage optimal telles que certains neuroscientifiques et pédagogues les avaient énoncées. J’avais appris par nécessité et par plaisir. Avant de me lancer dans l’aventure j’avais des a priori sur le sujet, et me faisais des idées que j’ai par la suite totalement remises en question. J’étais extrêmement motivée pour faire au mieux, et j’apprenais en faisant. Je n’avais suivi aucune formation académique sur ce thème particulier. J’ai assez rapidement rejoint mes pairs, nous nous réunissions pour échanger nos idées et les solutions que nous avions trouvées à certaines difficultés qui se posaient quotidiennement à nous. Étant de plus en plus passionnée par le sujet je me suis bâti ma propre formation en faisant quelques stages et en lisant des ouvrages traitant de toutes les pratiques connexes du thème central.

 

Cette expérience, si vous êtes lecteur de PEPS, il y a de fortes chances pour que vous l’ayez faite. Vous êtes devenus parents, et vous avez accueilli votre premier enfant la plupart du temps dans un mélange de ravissement et d’inexpérience.

Et vous avez appris chaque jour un peu plus, comme la majorité d’entre nous l’ont fait, car notre cerveau se transforme et nous aide à apprendre par la pratique, et quand on accueille un enfant, il n’est pas question d’attendre que nous soyons au point. Quelle que soit notre expérience avec les bébés, nous devrons accueillir, observer, réconforter 24 heures sur 24, nourrir, changer des couches plusieurs fois par jour (à moins que nous n’ayons opté pour l’hygiène naturelle, mais là encore il nous faudra devenir un écoutant des signaux que notre enfant émet pour l’accompagner dans l’élimination des selles et de l’urine).

 

Accompagner mes enfants m’a amenée vers tant de sujets passionnants, de véritables pépites que je continue de découvrir. C’est un peu comme si j’avais dessiné un gigantesque mind map, un thème m’amenait à un autre, puis à un autre et encore un autre.

De manière intuitive et personnelle, je me renseignais sur quelque chose quand je trouvais que cela pourrait être utile à notre quotidien familial.

Pour tout cela, il m’a fallu dépasser la maladresse que j’éprouvais les premiers temps. J’ignorais tellement de choses dans ce domaine-là. J’ai appris assez vite les bases classiques que me proposaient mon environnement social et ma culture familiale, de génération en génération. Être présente et affectueuse, nourrir mon bébé, régulariser le rythme de ses journées, lui lire une histoire chaque soir, reprendre le travail et le laisser à une assistante maternelle. Un schéma très classique où il fallait que j’apprenne à mon enfant à dormir, à manger, à se laver… Les choses n’étaient pas si simples, même si ma fille y mettait toute sa bonne volonté. Avec ma profession j’étais amenée bien sûr à faire des liens entre la parentalité et le comportement et le bien-être des enfants.

 

Je continuais à me poser des questions sur l’éducation, en trouvant quelques réponses qui m’amenaient à d’autres questions. Puis un jour, nous déménageons dans un petit village d’Ardèche. Là, je trouve un magasin bio et une petite revue sur la naissance, photocopiée et reliée par des agrafes. Dans les ressources de cette revue, je trouve L’enfant et la vie, et je crois que c’est à ce moment-là que j’ai remis en question le schéma global que me présentait la société sur les enfants. Je lisais surtout Jeannette Toulemonde [1] que je trouvais toujours très pertinente et incisive.

 

À force de creuser, de pratiquer, de questionner, de lire, d’échanger avec d’autres parents, j’ai remis en question à peu près tout ce que j’avais appris sur les enfants et les parents. Ma vie est devenue d’une grande richesse : toutes ces rencontres, ce travail sur moi, mes enfants qui me mettaient au défi chaque jour ! J‘ai fini par écrire le livre que j’aurais tant aimé lire lorsque j’ai accueilli mon premier bébé. Le thème de l’accompagnement des enfants est devenu un travail à temps plein pour moi, et j’ai réfléchi à des moyens efficaces de transmettre aux parents ce que j’avais mis des années à apprendre.

 

Je n’ai pas fini d’apprendre sur l’apprentissage… Je me questionne sur l’apprentissage inconscient qui se fait par imprégnation car je vois qu’il peut être très efficace, je m’interroge aussi sur l’influence qu’exercent Internet et les réseaux sociaux, en particulier sur nos comportements et sur l’ambivalence des êtres humains. En matière de parentalité, il est particulièrement important d’être authentique, mais il peut nous arriver de nous bâtir une sorte de personnage de parent parfait dans le but d’être accepté par un groupe de référence auquel nous avons un grand désir d’appartenir.

 

Quand je veux apprendre quelque chose de nouveau, je suis bien plus optimiste que je ne l’étais à 15 ans. Je sais que je peux le faire, en particulier quand je l’ai décidé. Je dois aussi combattre ma tendance à lire, regarder des vidéos, écouter des conférences : cela fait partie du travail, certes, mais c’est la pratique qui fait que tout évolue, que les questions que l’on se pose et les solutions que l’on trouve sont vraiment utiles pour avancer. Pratiquer, même quand on est complètement débutant-e, et aussi transmettre ce que l’on a appris, nous font énormément progresser.

 

Notre expérience de parent peut être un véritable mode d’emploi pour l’apprentissage en général. Elle a très souvent commencé par une motivation immense pour que notre enfant soit heureux. Cette motivation peut être difficile à transposer à autre chose, mais tout le processus que nous avons mis en place progressivement, le côté exigeant de la parentalité qui fait que tout change en permanence – notre enfant grandit et nous aussi, nous augmentons la taille de la famille, changeons de partenaire, vivons avec une autre famille – tout ceci ressemble fort à ce qui est essentiel aujourd’hui en matière d’apprentissage : une capacité de réflexion et d’adaptation rapide, une flexibilité importante.

 

À tout cela je voudrais ajouter deux éléments : la capacité à remettre en question ce que nous avons appris pendant l’enfance et ce que nous pouvons observer parfois du courant majoritaire, et la créativité ! Avec quelques outils nous pouvons trouver des solutions à chaque problème qui se pose à nous.

Devenir conscient que nous apprenons à être parents, plutôt que de se dire que cela devrait aller de soi, va nous aider à valoriser notre travail, et à chercher comment avancer et progresser !

Catherine DUMONTEIL-KREMER

 

[1] Nous vous avions parlé d’elle pour lui rendre hommage à l’occasion de son décès dans le pêle-mêle de PEPS n° 25.

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