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Parentalité Créative

Le véritable langage des bébés

LES PLEURS DES BÉBÉS

Quand un bébé pleure, toute une gamme de sentiments peuvent surgir en nous : de l’inquiétude en passant par la compassion, de l’énervement et de l’impuissance, jusqu’à la colère parfois ! Mais pourquoi pleure-t-il ?

C’est une question qui nous a peut-être tous taraudés et nous avons parfois cherché des réponses autour de nous, où les conseils ont probablement fusé : « Laisse-le pleurer un peu, c’est normal qu’il pleure avant de s’endormir », « Ne le prends pas dans les bras, il va être dépendant de toi, tu ne vas pas t’en sortir », « Il te manipule, ne te laisse pas faire, c’est toi qui commandes ! » Ce sont quelquefois les vestiges de l’éducation traditionnelle qui ressortent de façon automatique. Même dans les milieux où l’on souhaite respecter les enfants, la controverse fait rage. Il ne faudrait les laisser pleurer sous aucun prétexte, arguent certains, alors que d’autres au contraire prêchent que le fait de pleurer est un besoin de base. Une auteure parle même aujourd’hui de « sons » des bébés auxquels elle donne une interprétation précise. [1]

EXPLORER POUR COMPRENDRE

Il y a de quoi être perplexe ! Cela peut nous inviter au questionnement et à l’exploration de ce que notre bébé ressent. Pour ma part, j’ai toujours pensé que le bébé est un être de besoin, qu’il est très dépendant des adultes qui prennent soin de lui, et que lorsque ses besoins sont comblés il ne va pas pleurer, car les pleurs nous signalent que le bébé a souffert et qu’il est en train de résoudre avec les moyens qu’il a à sa disposition cette souffrance. Les pleurs vont l’aider à relâcher les tensions qu’il éprouve.

Finalement, quand il pleure, ce n’est plus le besoin qu’il exprime mais le relâchement de la souffrance due à la non-réponse à des signaux qu’il a exprimé mais qui n’ont pas été compris.

C’est un peu complexe à lire, j’en conviens, mais bien sincèrement, qui n’a pas entendu que le bébé pleure quand il a faim ? J’ai été complètement pétrie de ces idées erronées sur la question des pleurs. Comme beaucoup, j’ai pensé, lorsque j’ai eu mon premier enfant, qu’il pleurerait quand il aurait un besoin. Alors que l’expression de ce besoin se situait en amont des pleurs. Mon bébé avait un langage bien à lui, fait de mimiques et de gesticulations, de regards, de petits bruits. Mais de cela personne ne m’avait parlé, et je n’avais pas appris à comprendre ces signaux.

Pourtant, ma motivation pour être avec mon enfant, le contempler, et donc tenter de le comprendre, était immense. Je crois que tous les parents (pratiquement tous) sont désireux de prendre soin de leur tout-petit et qu’ils sont très sensibles aux informations qu’ils reçoivent. Il serait vraiment simple de leur proposer d’observer leur bébé et d’en tirer des conclusions sur sa façon personnelle d’exprimer ses besoins.

Ces derniers pourraient donc être comblés avant qu’une souffrance se manifeste, et que celle-ci soit suivie par des pleurs.

LA SIGNALÉTIQUE SUBTILE DES BÉBÉS

Avant de pleurer, le bébé émet des signaux, et quand il pleure il est plus qu’urgent de répondre, car même s’il est dans la résolution de sa souffrance, il y a une limite à sa capacité à apaiser les bouleversements qui le traversent.

Vous comprendrez peut-être mieux si je vous donne l’exemple d’un sans-abri qui a faim. Je pourrais l’écouter pleurer, certes, mais il vaudrait mieux que je l’aide à trouver de quoi se nourrir, sinon il risque de continuer de pleurer et sa souffrance va augmenter, car ce besoin physiologique se doit d’être comblé, cela ne se discute pas. Cependant, entre un bébé et un adulte, il y a une grande différence, le bébé est complètement dépendant, l’adulte, malgré ses blessures, a une expérience qui lui permet de combler la plupart de ses besoins physiologiques seul.

Cette écoute spécifique des signaux que l’enfant émet peut se mettre en place jour après jour. S’il se sent entendu, il va renforcer sa manière de demander ou d’exprimer ce qui lui manque.

Ce qui va aider à la communication avec le bébé, c’est la proximité, le peau à peau. C’est ainsi en définitive que le bébé se sentira rassuré et verra ses besoins de contact complètement satisfaits. C’est essentiel pour lui qui a vécu dans l’utérus maternel pendant neuf mois. Le voici à l’air libre et nos bras, notre corps, notre chaleur, les balancements quand nous marchons, le bruit de notre cœur, tout ce qui lui rappelle sa situation in utero va l’aider à grandir à l’air libre.

Pour nous, cela va ajouter aux informations obtenues en regardant le bébé avec attention une sensation très forte de ses mouvements, de sa détente ou de son stress, et nous commencerons à ressentir ses besoins. Les premiers écrits sur l’hygiène naturelle de l’enfant ont beaucoup apporté dans le domaine de la communication parent-bébé, émettant l’hypothèse que de nombreux messages circulent de façon subtile, pratiquement télépathique, entre un parent et son enfant lorsque la proximité est importante.

Je crois que nous avons encore beaucoup de progrès à faire pour comprendre les bébés, leurs besoins et leurs compétences. J’ai vu de nombreux bébés pleurer avant que leurs parents comprennent leur besoin d’uriner, leur permettent de le satisfaire dans un quelconque saladier et de ce fait voient les pleurs s’arrêter. Tout le monde ne pratique pas l’hygiène naturelle, pour autant la lecture du livre d’Ingrid Bauer (dont je vous parle dans les ressources) est intéressante pour se connecter à la subtilité de la communication qui existe entre parents et enfants.

ACCUEILLIR ET ÉCOUTER LES ÉMOTIONS

Lorsqu’un bébé pleure, notre rôle est de le prendre dans nos bras, de rechercher le besoin non comblé et d’y remédier, et c’est en général ce que nous faisons. Laisser un bébé pleurer seul n’est pas une option, les neurosciences affectives renforcent cette idée en nous apprenant que le cerveau des enfants qui pleurent seuls sécrète du cortisol en trop grande quantité et donc risque d’endommager leurs neurones. Même avant l’avènement des neurosciences, il semblait évident qu’un enfant qu’on laisse pleurer seul apprend qu’il ne peut pas compter sur ses parents lorsqu’il éprouve des émotions difficiles, et le bébé, lui, peut vivre un véritable traumatisme, étant donné sa grande dépendance. Il n’a aucun moyen de combler ses propres besoins seuls. Dans ce domaine, l’acquisition de la marche fait évoluer sa situation, il va pouvoir montrer, se déplacer et se faire comprendre beaucoup mieux et plus rapidement. Avec cette étape fondamentale, des pleurs de frustration, d’impuissance, vont souvent être exprimés. Les bambins ont souvent des projets ambitieux tout en n’ayant que peu d’expérience et d’habileté pour les réaliser.

QUAND NOUS NE TROUVONS PAS DE SOLUTIONS

Quand le besoin du bébé est comblé, ou que le problème de santé est résolu, il ne pleure plus. Mais que faire s’il continue à pleurer malgré toute notre bonne volonté ? Nous avons vraisemblablement tout essayé et rien ne semble le satisfaire. C’est là que l’écoute des pleurs prend tout son sens. Être là, présents, avec lui dans nos bras, et écouter son chagrin semble être la seule possibilité qui reste. Et elle est essentielle.

Encore une fois, pourquoi pleure-t-il ? C’est difficile à dire, mais on peut toujours essayer de se demander s’il n’est pas en train de récupérer d’une grossesse ou d’une naissance difficile, d’un non-désir, ou bien de journées où il a ressenti très fort les tensions qui envahissaient les adultes autour de lui. Peut-être aussi a-t-il vécu beaucoup de changements par rapport à sa capacité d’intégration : une surstimulation peut être à l’origine de pleurs inconsolables. Mais quoi qu’il en soit, accueillir ses pleurs pourra l’aider à passer un cap et à récupérer des situations qui l’ont inquiété, effrayé, attristé.

 

En tant que parent, nous apprenons beaucoup de cette écoute de nos bébés, c’est quelque chose que nous aurons très souvent l’occasion de faire avec nos enfants. Car les êtres humains ne cessent jamais vraiment de pleurer…

 

 

Catherine DUMONTEIL-KREMER

 

[1] (note : “Pourquoi pleure-t-il ?” )

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