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Parentalité Créative

Fromage ou dessert ? L’usage du choix dans l’accompagnement des enfants

Fromage ou dessert ?

Voilà un choix qui me contrarie d’emblée ! Cette alternative me frustre ô combien ! Et dans le fond je sais où il veut en venir le restaurateur, ce sera l’un ou l’autre et pas plus. Il pousse dans ses retranchements ma gourmandise ! L’enfant à qui on propose un choix connaît-il notre objectif ? Le choix est-il une alternative à la violence éducative ?

Un pantalon jaune ou vert ?

« Tu veux un pantalon jaune ou vert ? », « Tu préfères faire tes devoirs avant ou après le repas ? », « tu veux une soupe poireaux pomme de terre, ou plutôt celle à la carotte ? », vous avez peut-être déjà utilisé ces propositions pour vous sortir de situations embarrassantes, arguant du fait que le choix « marche ». Car à partir du moment où l’humain se trouve dans un espace de liberté, il avance bien mieux. De nombreuses études le prouvent, la liberté nous sied à merveille.

Une liberté restreinte

Et de ce fait, la technique du choix fait partie des stratégies commerciales les plus efficaces. Lorsqu’un représentant veut obtenir un rendez-vous il va peut-être nous proposer : « lundi 9 heures, ou mercredi 14 heures ? ». Il met symboliquement un pied dans la porte, en nous donnant une illusion de choix. Et parfois ça fonctionne, car cette illusion ajoutée à notre crainte de dire non à un adulte, va souvent nous rendre « dociles ».

Concernant les enfants, en proposant une alternative, nous avons un but. Quand « innocemment » je lui demande s’il veut faire sa dissertation avant ou après le repas, l’objectif est clair : JE veux l’amener à la faire. Il n’a pas le choix ! Ses possibilités de choisir vraiment ce qui lui conviendrait sont réduites comme peau de chagrin.

En réalité, si je lui ai proposé un choix, c’est pour lui donner une impression de liberté, pour qu’il respire un peu dans un espace restreint. J’aménage, j’organise qu’il se sente un peu plus à l’aise avec la tâche à faire, le vêtement à mettre, l’aliment à ingérer. Mais dans le fond il est coincé. Il le sentira assez vite. Les enfants font preuve d’une sensibilité et d’une intelligence[1] fraîche et active. Ils ne nous laisseront pas faire ! Au bout d’un moment, un petit normalement constitué qui n’a nulle intention d’avaler sa soupe, nous le fera savoir et entrera en résistance !

Choix ou menace ?

Il existe une autre forme de pseudo-choix. La formule consiste à dire par exemple : « Tu mets tes chaussures ou nous n’allons pas au parc, tu as le choix ! ». Ceci fait bel et bien partie de l’arsenal répressif que nous avons connu enfant. Voilà une autre possibilité : « Tu ranges mes outils ou je ne te les prête plus ». C’est une autre forme de menace qui n’a rien à voir avec un choix. Tiens, je me demande d’ailleurs si ces situations nombreuses où nous pensons que nous n’avons pas le choix, et celles où nous sommes incapables de choisir, ne prendraient pas racine dans ces faux choix vécus enfants.

Soyons fous !

Et si nous les laissions vouloir pour eux-mêmes ! Si nous leur faisions complètement confiance. Cela vous semble impossible ?

Peut-être par petits morceaux est-ce envisageable… Quel est le domaine où vous vous sentez souples ? Où votre colère n’est pas réactivée ? Vous pourriez commencer par là.

Lorsque mes filles étaient petites, je me suis rapidement rendu compte, après un travail partiel sur mes conditionnements autour de l’alimentation, que commencer par le dessert, et même parfois ne manger que ledit dessert n’avait pas de conséquences fâcheuses.

Très vite, elles n’ont plus pris leur repas systématiquement à table. Et vous ? Où se trouve votre espace de liberté ? L’endroit où vos blessures d’enfant ne viennent pas vous harceler ? C’est parfois par là que l’on peut commencer. Et puis, peu à peu, en observant ce qui fait sortir nos monstres intérieurs, nous les apprivoisons et nous avons alors de plus en plus confiance en nos enfants, desquels nous devenons un allié vraiment utile !

Ce n’est qu’un exemple, mais je crois que le fait de devenir parent m’a engagée sur le chemin de moi-même. Un processus s’est mis en marche, et je n’ai pas pu faire autrement qu’avancer vers ce que je suis. Cela vous tente ? Alors allons-y ensemble !

 

Article initialement paru dans Peps magazine n°1


[1] Même si ce concept est sacrément mis à mal par les scientifiques aujourd’hui, tout le monde a une quantité équivalente de manière grise, c’est l’usage qu’on en fait qui est essentiel.

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